Événement annulé !
LA FEMME EST SENTIMENTALE
de Zabat Olivier
00h10min, France, 2001, Langue : portugais
Sur une plage brésilienne, deux adolescentes issues de favelas parlent des joies et des violences de leur quotidien.
Pourquoi La femme est sentimentale n’a-t-il pas été intégré à Zona Oeste ?
Olivier Zabat : Ces deux filles n’ont rien à voir avec ces gens-là ; elles ne font pas partie du même monde du crime, même si elles le côtoient. Ajouter cette séquence n’aurait été qu’une association gratuite. J’ai donc fait deux films distincts, dont l’un serait la conclusion de l’autre. Ces deux jeunes filles fournissent en effet le meilleur contrepoint aux démonstrations de force masculines de Zona Oeste : elles s’expriment à visage découvert, sans volonté de domination, alors que les membres du gang ou les policiers, certes très forts, restent cachés, avouant du même coup une forme de faiblesse. La femme est sentimentale continue le travail de désamorçage en cours dans la troisième partie de Zona Oeste. Il démystifie un peu plus ce monde de fiers-à-bras, clairement masculin.
(Images de la culture, 2006)
ZONA OESTE
de Zabat Olivier
00h41min, France, 1999, Langue : portugais
Un triptyque sur les forces en jeu dans la violence des favelas de Rio de Janeiro : des adolescents qui se disent « du côté juste de la mauvaise vie »; des exterminateurs qui « extirpent le mal » et un ancien prédicateur devenu chef de gang qui est convaincu de sa rédemption « devant la justice de Dieu ».
Zona Oeste a été très formateur sur l’exigence et l’implication personnelle nécessaires à toute prétention artistique, toutes pratiques confondues. C’est aussi au Brésil que s’est formée cette «neutralité ». D’abord, elle est née d’une nécessité. Si on ne garde pas une neutralité totale avec des narcotrafiquants, bandits et mercenaires, on risque tout bonnement la mort. C’est arrivé à certains cinéastes et journalistes. Il faut être d’autant plus vigilant quand on n’est pas de la culture du pays, surtout si l’on a l’ambition de la comprendre, ne serait-ce qu’un peu. Dans ce cas, la neutralité, c’est aussi de l’humilité, du respect. Il se trouve aussi que j’ai pendant des semaines accompagné avec ma caméra Eduardo Santoro, un personnage extraordinaire, photographe d’un journal de faits divers, la plupart du temps résultats des guerres de gangs. Le suivre sur les lieux de Rio où il photographiait des cadavres en morceaux, des crânes ouverts ou des têtes tranchées a exigé de moi que je m’abstienne de sensiblerie pour mes images. C’était une bonne école. Zona Oeste, comme son titre l’indique, est un lieu d’apparence déterminé, mais aussi une direction et un non-lieu. C’est assez vertigineux de faire ses premiers pas dans un monde aussi marquant tant en termes de stéréotype et de lieu commun, mais un lieu commun qui est une zone de non-« droit », où le simple fait de s’y trouver ne serait-ce que sur un temps, précipite dans la question du politique au sens le plus générique. Où et comment se pose dans ce cas le « devoir » : le devoir de vérité, d’authenticité, d’éthique, de jugement, de didactisme, d’art ?Dans Zona Oeste, il y a une progression très marquée : des délinquants et des policiers des favelas – dont la mise en scène est conditionnée par une certaine préfiguration, un apprentissage théâtral que la présence des milieux télévisuels a nourri chez eux –, jusqu’à la figure de l’évangéliste, un personnage plus « réel », atypique, ambivalent, qui n’a apparemment pas été victime de ce conditionnement. Sur ce chemin, un processus de démythification se met en marche, un processus de constatation de la théâtralité, de destruction du cliché télévisuel, de la parole, des attributs, des démarcations… À mon sens, le fait que Zona Oeste se penche autant sur le réel est un geste très politique.
Propos recueillis par Alfonso Camacho (elumiere.net, 2011)